“Moi…Lolita”

Je regarde le film un peu perturbant « Mignonnes » de Maïmouna Doucouré, qui racontent les déboires d'Amy, 11 ans, tiraillée entre enfance et adolescence. La cinéaste aborde un thème sensible mais central : celui de l'hypersexualisation des pré-adolescentes, et met le doigt là ou ça fait mal.

HYPER-SEXUALISATION, le mot est sur toutes les lèvres, et pourtant, sa signification reste difficile à décrire tant il représente un phénomène inquiétant et grandissant.

Entre les concours de mini-miss anglo-saxons qui font scandale, la démocratisation d'une lingerie trop suggestive pour les enfants (strings et soutien-gorge à 5-6 ans, sérieusement ?), les codes vestimentaires ou shooting photos de gamines un peu trop sexy, les exemples d'hypersexualisation se suivent et dérangent, pourtant on est dans un tabou permanent :

En observant le réseau social Tik-Tok dériver sur des contenus de plus en plus provocants, je me demande si ces jeunes filles ont vraiment conscience de ce qu'elles renvoient quand elles se filment en train de danser derrière leur écran. Les pré-adolescentes sont clairement dans un mimétisme permanent car elles voient leurs stars préférées, et beaucoup de femmes donnant cette image, selon laquelle il faut se construire comme un objet de désir, pour avoir du succès.

Les fillettes imiteraient donc ces comportements sans forcément en comprendre tous les mécanismes, elles sont surtout dans une course aux "likes" et aux « followers ». On entre dans une Ère ou les pratiques digitales sont excessives et ce comportement serait directement lié à l'influence des marques : la nourriture, le sommeil, l'amitié, l’amour, la vie quotidienne, presque tout s’achète aujourd’hui, tout devient marchandise.

Si l’usage du téléphone est en parti responsable de cette surenchère et de la surexposition des petites filles, le phénomène de la "femme objet" ne date pas des réseaux sociaux.

La présence de l'hypersexualisation dans les médias est née de la révolution sexuelle, vers 1960, ou on assiste à une visibilité accrue de la sexualité et sa commercialisation dans les médias, que ce soit dans le cinéma ou la musique : Le terme « Lolita » est née d’une oeuvre littéraire controversée de Navakov, repris au cinéma en 1962 par Stanley Kubrick. Souvenez-vous de « l’Amant », inspiré du livre culte de Marguerite Duras, et réalisé par Jean-Jacques Annaud en 1992, le film Oscarisé, nous raconte l’amour passionnel entre une jeune fille de 15 ans et un riche banquier chinois, dans l’Indochine des année 30.

L’actrice Brigitte Bardot dit « BB », objet de désir mondial, était pourtant l’incarnation de l’émancipation féminine sous la plume de Simone de Beauvoir. On se souvient aussi tous de l’adolescente joué par Nathalie Portman dans Léon (1994), le long-métrage de Luc Besson.

La sexualisation des héroïnes de dessins animés n’est pas épargnée : la petite Sophie, personnage phare de l'univers d'Inspecteur Gadget, Charlotte aux fraises ou encore Dora ont bien grandit et se sont toutes faites relookées. On notera également la minceur des héroïnes des derniers Disney, Cendrillon devient "has been », et aux oubliettes Blanche neige ! avec sa silhouette un peu trop « potelée ». La dernière princesse de la célèbre compagnie, « Merida » s’est vu retirer son arc, remplacer sa tenue d’ado rebelle par une robe à paillettes, et on lui a affiné la taille pour qu’elle puisse intégrer la liste Marketing officielle de ses 11 copines « Princesses Disney ».

On apprend à ces enfants qu'elles sont là pour plaire et pour séduire à travers leur apparence physique, et ce quel que soit leur âge. L’exposition des corps est devenu du marketing.

Outre le fait que tout cela en font des cibles idéales pour les « prédateurs », cette hypersexualisation aurait un impact dévastateur sur l’estime de soi de ces adolescentes en devenir, et les amèneraient même à des troubles alimentaires en les faisant fantasmer sur des idéaux de beauté inatteignable.

Alors quelles solutions ?

Les médias et entreprises spécialistes de la petite enfance ont clairement un rôle déterminant à jouer, par exemple en interdisant purement et simplement l’exposition de petites filles trop sexuées dans les médias, ou en s’engageant à imposer des contraintes d’âge ou de poids des modèles, des conception plus respectueux de l’habillement.

Mais soyons honnête deux minutes, les parents ne contribuent-ils pas eux aussi à nourrir ce phénomène ? Il faut avouer qu’il est facile de laisser-faire, il y a un certain conformisme de la part des adultes qui acceptent les modes et nourrissent le culte de l’image. Dans tous les domaines, les enfants ne sont plus considérés comme enfants mais comme des ‘mini-adultes’ et cela leur porte préjudice.

Les femmes veulent aussi une plus grande complicité avec leur filles, et veulent rester jeunes plus longtemps, mais elles en oublient qu'elles sont des adultes… contrairement à leur enfant !

On en est donc là : Les jeunes veulent vieillir, les adultes rajeunir alors comment trouver sa juste place quand on évolue dans une société pleine de paradoxes ? L’impératif de ne pas faire son âge est vraiment révélateur d’une époque : on fait grandir les enfants trop vite mais on cultive en même temps le « Jeunisme » chez les adultes en nous conseillant (cerise sur le gâteau) de retrouver son âme d’enfant !

On en viendra bientôt à brouiller les générations et a une ère du « NO AGE ». Tous les moyens sont bons : tendances vestimentaires, langage, chirurgie, livres de développement personnel…il n’y a jamais eu autant de coach de vie en tout genre pour nous faire savoir qu’on est jamais assez jeune, jamais assez intelligent, assez mince, assez beau, jamais assez sexy, assez zen !

S’il devient difficile d’agir pour protéger nos petites filles dans une société bipolaire et hypocrite pourquoi ne pas leur laisser tout simplement le temps de grandir ? Sans voler leur enfance en faisant d’elles des objets marketing, à un âge insouciant tellement riche en créativité, curiosité et spontanéité.

Laissons les, être qui elles sont, avec tout leur potentiel et choisir d’être les femmes qu'elles ont envie de devenir !

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